dimanche 15 novembre 2015


PROMENADE

  

Ô mon Âme
J’ai vu ce spectacle grandiose
Théâtre vibrant
Des êtres et des choses
Vu entendu touché
J’étais là, témoin de tout
L’espace d’un instant
Vivant privilégié
Une tranche d’éternité
Goûtant de tous mes sens
L’essence de l’existence
J’étais de cette promenade
Où nous avons été mon cœur
Seuls
Et si nombreux

 
Sur un chemin de campagne
J’allais 
Au milieu d’une toile admirable
Traversant un univers
D’éclairages fauves
D’huiles parfumées
Véritable tableau de grand maître
Où tout est là
Superbement dessiné
Tout est là déjà
On n’a rien à imaginer
Des jeux de lumière
Un son de rivière
Un chien qui aboie
Des roches des ronces des pierres
Arbrisseaux se bousculant
Entre les arbres fiers
Il ne manque que l’espace

 
Et la vie dans tout ça qui fourmille
Furets escargots fourmis
Étrangers l’un à l’autre
Impliqués l’un et l’autre
Me regardaient passer
M’attendaient même peut-être
Être vivant mon Âme  
Vivant
On devrait s’en étonner toujours

 
J’étais du décor
Exactement au centre de tout
En invité ou en intrus
J’allais
Chez moi et chez eux
Étranger des lieux
Petit voilier sur la mer
Fragile et audacieux
Mais toléré des dieux
Et je me disais
«Regarde mon âme
   Ce monde qui te reçoit
Il ne te doit rien
Tu lui dois respect
Apprends de lui la paix
Tous ces destins luttent et se côtoient
En contraintes et en contraires
Et pourtant
Rien ne déborde
Tous assujettis
Ordonnés dans le fouillis
Suivant
Ô mystère
  Quelque chose
  Comme un Grand Ordre »
 

Nous passions
Mon âme
Bêtes et béats
Bêtes sans être sots
Bêtes comme les bêtes
Qu’un ventre plein suffit
Félin alangui
 Presque végétal
Ah
Ne plus penser
Voir
Ne plus penser
 Sentir
Ne plus penser
Entendre
Ne plus penser
Être
Être spectateur attentif
Humble et discret
Oubliant un instant
L’idiote prétention
D’être dominant
On a de supérieur que la capacité de détruire
Les êtres les mieux adaptés
  Comme cette hirondelle qui vient de passer
Capable sur trois dimensions
De se mouvoir dans l’horizon
Un mouvement d’ailes
La voilà envolée
Laissant par terre
L’être lourd que je suis
Traînant comme boulet
Sa conscience vaine
Futilité
Dont toute la nature se passe

 
Je rentre de cette promenade
Comme on revient d’un cirque
Encore étourdi
Par tant de voltiges
Toujours ébloui
Devant le prodige
Et je comprends que la solitude n’existe pas
Il y a toujours le décor
Il y a toujours l’autour
Il y a moi qui parle
Il y a mon âme qui écoute
Nous sommes seuls
 Mais si nombreux

 
Vivant Vivant Vivant
On devrait s’en étonner toujours
De l’éternité juste un instant
Juste un instant
Et c’est bien suffisant

 

***