dimanche 25 novembre 2007

Le petit mot de la semaine

Il n’y a bien que les niaiseux pour ne pas aimer niaiser
Niaisons avant que la mort nous prenne au sérieux.
VENDREDI DERNIER, MON CHIEN



Moi, le maître, je sors mon chien qui demandait la porte. «Vas-y chien-chien, fais ton besoin ». Durant ce temps, je m’étends. Le divan est libre et je suis libre. Pourquoi ne pas profiter d’une heure avant le souper, pour une petite rencontre? Un 5 à 6.
Mais, inquiet que mon doux pitou joue, genoux dans la boue, je me lève et regarde par la fenêtre. Qu’est-ce qu’il fait ? Rien. Allongé sur le patio comme le sphinx, il regarde droit devant. Bravo. Je retourne m’étendre.

Dix minutes à chasser les mauvaises pensées, et puis… le téléphone sonne : « Non, merci, je n’ai besoin de rien ». Coup d’œil en passant sur mon chien. N’a pas bougé. Un chien de faïence. Toujours le regard droit devant. Un vent doux dans les poils et le soleil plein la gueule. Parfait ! Retour à l’horizontal.

« Reprenons. Que disiez-vous mon cher sofa ? » Quelques petites préoccupations à classer : ne pas oublier mon rapport, préparer le souper dans 30 minutes, ne pas oublier de parler à Chose de ceci, de cela à Machin à propos de , à propos … oh, à propos mon chien, faut pas que je l’oublie. Qu’est-ce qu’il fait ? Il ne se salit pas au moins? Je me lève encore pour aller voir. N’a pas bougé. Toujours le regard droit devant. Majestueux, altier. Mais qu’y a-t-il donc devant ? Je ne vois rien. Rien que le décor habituel. Ah, le con !

Re-retour à l’horizontal. Allez, un petit somme. Ne reste plus que 15 minutes, mais bon, ça suffira. Allez! Allez! Allons Morphée, ouvre tes braaaaas…………. Rien. Tout. Plein de dossiers ouverts. Que lumières. Des idées et des mots, des chiffres et des lettres. Autrement dit tout et rien et rien du tout. Re-téléphone : « Non, elle n’est pas encore arrivée. Oui, je ferai le message. » Re-retour à l’horizontal. Oh! Mais avant mon chien ?

N’a toujours pas bougé. Catatonique, pétrifié, statue de sel. On me l’a remplacé, c’est ça ! On veut me tromper avec une effigie. Bientôt quarante-cinq minutes sans bouger, sans parler, sans grignoter. Sans dormir non plus. Quarante-cinq minutes de pure contemplation. Sans interruption, ni basses distractions. Quarante-cinq minutes à ne rien faire d’autre que communier. Humble et puissant. Un record pour le genre humain. (Sauf un moine, bien sûr).

Je n’en peux plus. « Rentre le chien, je n’arrive pas à me détendre, tu me stresses ». Mon chien a eu pitié de moi, il est rentré, s’est étendu sur le tapis laissant échapper un long soupir en me regardant… ce qui m’a un peu vexé.

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EXERCICES :

1) D’abord, répondre à cette question : C’est qui le cave? Lequel est de la race supérieure ?

2) Ensuite, il faudra me démontrer que mon chien a passé sur cette terre un 45 minutes moins heureux que moi au volant d’une voiture neuve.

Vous avez le droit de vous consulter. Vous avez 45 minutes.

En attendant, je poursuis.

L’homme ne s’étend pas longtemps sans être tourmenté. Mais tourmenté pourquoi ? Peut-être parce que, contrairement à l’autre, il est capable de création et de réalisation, lui (Tiens! Prends ça le chien). Si on lui ajoute à ça l’orgueil, la vanité, la conscience, l’angoisse, ça nous donne une bibitte aux multiples besoins qui se met à produire et produire pour combler ses attentes. Cette quête insatiable de plaisir c’est le paradis perdu, l’état de grâce jamais atteint. Ça nous passe comme l’eau dans les mains; on en échappe toujours plus qu’on en prend. Et on re-produit, et on re-consomme. On cherche, on recherche, invente, réinvente… toujours trompé par l’esprit plutôt que nos sens. On n’atteint jamais le désir, à le dépasser toujours. (Belle phrase ça). C’est la surchauffe : surconsommation, surproduction, ne pouvant qu’exciter et frustrer davantage. C'est la poursuite de cette chimère qu’est l’ambition.

L’AMBITION, voilà, c’est ça le grand mal. L’ambition, cette maladie virulente qui ne s’attaque qu’aux humains, une maladie dégénérative qui infecte tout le système de valeurs humano-déficitaire acquis des personnes atteintes.

Et c’est grave docteur ? Oh oui, beaucoup y laissent leur vie. L’amour et la paix aussi.
Peut-on se guérir de cette ravageuse ? Il y a de l’espoir. Certains se soignent en suivant des thérapies poétiques et philosophiques ou encore en pratiquant les exercices recommandés tels que :

CHANTER, DANSER, RIRE et BOIRE
(Vaut bien mieux moins d’argent)
RIRE ET BOIRE PLUS SOUVENT
…. et garder le lit.


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