dimanche 20 avril 2008

VIVE L’ENNEMI… suite


J’en entends rire dans le coin. Ils me prennent pour un utopiste, un pacifiste bêlant parce que je dis ¨pardonnons à ceux qui nous ont offensés¨.

Si c’est une utopie de mettre fin aux guerres par le pardon, c’en est TOUTE UNE de croire y mettre fin en allant massacrer l’ennemi. On ne tue pas impunément des pères de famille, des époux, des frères, des enfants en espérant rétablir la paix. Il y aura toujours vengeance, revanche, ressentiment,… puis, chose bien étrange, comme si à la fin ça n’intéressait plus personnes, fin des hostilités. Car il y a toujours une fin aux hostilités. C’est qu’entre temps il arrivera d’autres chefs, d’autres évènements et de guerre lasse nos dirigeants finiront par s’allier de nouveau. On modifiera nos politiques, on trouvera un terrain d’entente, on fera des compromis, bref, on se remettra en commerce, et les chefs qui auront perdu la face, eh bien, on les tassera.

Alors le peuple qui suit toujours, suivra. Comptera ses morts, haïra toujours l’autre, mais sans coup férir. Au moins jusqu’à la prochaine génération. C’est ainsi, les guerres finissent toujours par finir. À moins de s’exterminer il y a nécessairement une suite aux choses. Mais il faut se tuer beaucoup avant, tant qu’il y en a un qui se sent plus fort que l’autre. C’est comme ça. C’est la vie!


J’en entends toujours rire dans le coin.

On me traite de naïf, utopiste, pacifiste bêlant parce que je rêve à la prise de conscience de chaque homme de bonne volonté, parce que je prône la non-violence et que je suggère de demander pardon à l’ennemi.

Je sais bien, ce n’est pas original ce que je dis. Un autre l’a dit avant moi. L’autre-là, le nazaréen. Celui dont tout le monde (ou presque) en occident prend pour un dieu : le Christ. Sauf que si on pense comme lui on passe pour un christ de fou ! Si on suit son enseignement on se fait aussitôt crucifier. On dirait que c’est inévitable. Son enseignement… vous savez ce que je veux dire, cet Évangile que tous les chrétiens pro-vie et pro-guerre récitent les dimanches : « aime ton prochain - tu ne tueras point - pardonne à tous ceux qui t’ont offensé - présente l’autre joue - »… Vous qui riez dans le coin, vous comprenez un peu ce qu’il dit, j’imagine. Alors vous comprenez que votre Jésus est un grand utopiste. Votre modèle est un merveilleux pacifiste bêlant… que tout le monde prie le matin et contredit toute la journée.

Eh bien ! Moi, l’énergumène, c’est de ce grand philosophe que je m’inspire quand je rêve à la paix. Sauf que je reconnais qu’il a mis la barre un peu haute. Il aurait pu juste s’en tenir à ce message : « Endurez-vous les uns les autres, comme je vous ai enduré ».

Pauvre Jésus, il n’en a pas fini de dire à Dieu : Pardonne aux hommes car ils ne savent point ce qu’ils font. Même deux mille ans après, ils ne savent toujours point ce qu’ils font et n’ont toujours rien compris. Ils sont bons pour prier mais pas tellement pour comprendre. Es-tu sûr, pauvre Jésus, d’avoir choisi la bonne espèce ? Comme disait Nietzche : Au fond il n’y aura eu qu’un seul chrétien, et il est mort sur la croix.


JE LE CRIE : Quittons les groupes. Au moins dans notre cœur. Ne pensons plus comme un groupe, une race, un peuple. Désendoctrinons -nous, on n’appartient à personne. Nous sommes déjà complets en nous-mêmes, et tous pareils. L’autre en face de nous, l’ennemi, c’est un homme, peut-être un père de famille, peut-être un excellent conteur d’histoires, peut-être un copain idéal de pêche, on ne sait pas. Lançons nos fusils. Retournons les balles aux industriels. Laissons les chefs* s’entre-dévorer et pleurons un bon coup nos souffrances communes infligées à chacun, puis après allons boire ensemble à la chance extraordinaire d’être en vie et de goûter à ce même coucher de soleil… ahuri de nous voir tous paisiblement le contempler.

D’entre toutes les utopies, c’est celle-ci que je choisis : la paix par le pardon, par la réflexion, par le partage équitable, par les ententes de gros bon sens, par cet éclair de conscience entre deux ennemis armés, seuls responsables de la mort de l’autre. Seuls responsables.

Utopie, j’en conviens, mais d’une logique efficace. Il faut peut-être préparer la guerre pour avoir la paix, mais sûrement pas la faire. Aucune guerre ne mettra jamais fin à la guerre. Sauf, bien sûr, LA DERNIÈRE, qui sera totale et mettra fin aussi à l’humanité. Ou en fera peut-être le vrai début…

On est à quelques fous de périr à jamais. De rejoindre les dinosaures. Et ce sera bien dommage, car cette si belle planète aura vu disparaître une autre espèce dominante qui, par moment, était sublime. Il me semble.





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*Les chefs... Vous savez de quoi je parle, pas les poseurs-secrétaires élus qui doivent à gauche et à droite, je parle des vrais : les petits chefs des petits fiefs qui rêvent de puissance, qui, devenus grands, seront de dangereux tourmentés. Je parle de ce tout petit pourcentage de la société qui nous dirige selon leurs affaires, leurs ambitions, leur sanctification : les petits rois de village, de commerce, de religion, d’opinions publiques, de pouvoirs administratifs, de carrière, de réussite sociale,…

Ça suffit. La semaine prochaine, un poème... il est temps !