dimanche 13 avril 2008


Vive l’ennemi !



Chaque jour à la radio, à la tété, dans les journaux, au bureau, dans la rue, on n’arrête pas de me vendre de l’indignation et de nouveaux ennemis : les musulmans, les sikhs, les mohawks, les talibans, Al Qaeda,…

Je veux bien avoir un ennemi ou deux, mais tout un groupe, une société, une race… c’est beaucoup pour un seul homme ! Surtout quand on ne les connaît pas personnellement. Je ne peux pas haïr comme ça n’importe qui dans le tas, faudra d’abord me les présenter, nous laisser faire un peu connaissance. Et après, s’il y a lieu je m’en ferai personnellement des ennemis. Pour l’instant je suis plutôt indifférent. Pour l’instant ce sont plutôt les ennemis des autres. Qui sont les miens, d’accord ! Mais tout à fait par hasard. C’est de la politique tout ça. Je regrette de ne pas être plus patriotique que ça. Je comprends que les leaders de chaque communauté s’empoignent sur leur plus-meilleure idéologie, mais nous, citoyens ordinaires d’un clan comme de l’autre, qu’avons-nous tant à être de fanatiques partisans ? Ce n’est quand même pas Canadiens-Bruins. Qu’avons-nous tant à nous exciter la fibre haineuse ? Ne pas aimer me semble bien suffisant; haïr, c'est déjà trop de considération.

L’ennemi commun me semble une chimère. Une vue primitive et grégaire. Mais aussi - et ça c’est bien commode - l’ennemi commun est rassembleur et toujours responsable de nos malheurs. C’est toujours très pratique pour nos petits chefs et manipulateurs d’opinion.

Sauf que moi, je crois qu’il y a au fond de chaque homme une prédisposition à l’harmonie, au repos, à l’acceptation du sort; une petite voix presque toujours étouffée par la clameur populaire. Une petite voix dont on doute ; il semble tellement que les autres savent de quoi ils parlent. Ils ont l’air convaincus. Ils sont nombreux, ils doivent avoir raison. Puis après tout, haïr un peu ça fait du bien à tout le monde.


TOUT, ABSOLUMENT TOUT devrait être questionné : la religion, nos chefs, nos amis, nos parents, nous-mêmes. Même cette affirmation. TOUT est questionnable, critiquable, falsifiable. TOUT, la science incluse.

On a tous une conscience dont on ne pourra jamais sortir. Tout le reste disparaîtra en grande insignifiance quelques instants avant de mourir : les autres et leurs idées. Il n’y aura plus personne pour parler pour nous. On sera seul avec notre conscience qui nous questionnera (sachant bien les réponses) et nous fera paraître ce dernier instant une éternité.


« J’ai des ennemis et je m’en vante. Je crois les avoir mérités. »
Anatole France


Un ennemi, normalement, c’est celui qui nous en veut ou nous envie. Mais quoiqu’il en soit admettons au moins ceci : il n’a sûrement pas tort de nous en vouloir ou nous envier. Pour qu’il nous haïsse tant, on lui cause un tort quelconque. On l’écœure quelque part, c’est certain. Si on ne comprend pas ses raisons ce serait bien de commencer par les lui demander. Bien sûr faut se défendre… mais ce serait bien de s’excuser avant.

Dans toute lutte chacun a raison : celui qui a faim et celui qui défend sa proie. Chacun a une cause légitime. Inversez les rôles et chacun agirait de la même manière. Dans un conflit ça vous prend absolument haine et peur sinon vous pourriez finir par prendre parti pour votre ennemi.

Heureusement les chefs c’est pas des fous! Ils savent entretenir le ressentiment contre l’autre pour nous éviter une guerre de pétards mouillés : propagande, offenses, crainte, menaces… et ce n’est pas long que les plus paniqués d’entre nous crieront Aux armes, citoyens! Et voilà, le feu est pris, la guerre bénie. Dieu, le premier, se sera déjà enrôlé. Alors le peuple qui suit toujours, suivra. Il épousera la cause.


« On croit mourir pour sa patrie, on meurt pour des industriels »
Anatole France, toujours le même


Il n’y a pas d’autres motivations à la guerre que la convoitise d’un petit groupe. Pourtant il n’y a jamais d’autres appels à la nation que celui de la légitime défense. C’est quand même curieux que deux nations se fassent la guerre seulement pour se défendre !


ON EST À QUELQUES FOUS DE VIVRE EN PAIX.


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La semaine prochaine, suite et dernière partie sur ce topo