dimanche 29 mars 2009

Une autre entrevue avec moi-même, mais cette fois c’est sérieux, enfin pas trop niaiseux… même un peu plate et beaucoup long.


Discours sur la morale


Moi - Déjà le titre ça fait sérieux. Mais n’est-ce pas un emprunt de Nietzche ?

Moi - Non, lui c’est la Généalogie de la Morale. Descartes c’est le
Discours sur la Méthode. Moi c’est un peu des deux.

- Que pensez-vous justement de Nietzsche ?

- Je pense qu’il y a beaucoup de lettres inutiles.
(Celle-là n’est pas de moi… mais c’aurait pu)

- Bon, on avait dit qu’on serait sérieux…

- C’est vrai. Sérieux. Sérieuuux!

- D’abord, qu’entendez-vous par la morale?

- Rien de savant sur le Bien ou le Mal. Ni non plus sur les Devoirs et les Buts de la vie. Ça viendra peut-être un jour. Non, en fait le titre c’est pour accrocher. C’est de moralisation que je veux parler : l’intérêt d’avoir une approche consciente sur nos actions et de communiquer ses interrogations morales ou philosophiques.

- Moraliser : le mot déjà indispose. Car qui en a l’autorité ? Qui a la meilleure Morale ? Ce qui est bien pour un peut ne pas l’être pour l’autre, et vice versa. Chacun propose sa façon de voir, et voilà. Chacun croit toujours avoir raison, sinon chacun penserait autrement.

- C’est juste.

- Alors, il est tout à fait stérile ou erroné, de vouloir corriger la conduite de l’autre.

- Il ne s’agit pas, dans mon cas, de trouver LA VOIE pour tout le monde. Je laisse ça aux savants philosophes et hommes de science, qu’ils s’amusent. Je cherche pour moi la compréhension des choses, la meilleure attitude à prendre pour une vie en harmonie, sage et satisfaisante.

- Mais alors, pourquoi faire la morale aux autres ?

- Je ne la fais pas aux autres; on vient de dire que c’est bête, et je le crois. Au début de cet ouvrage, dans la préface je crois, j’ai bien avisé le lecteur, que toutes ces réflexions me concernaient. Je n’écris que pour moi. Je me fais la morale. Je cherche. Je m’insulte. Je me brasse. Je publie seulement parce que j’ai l’impression que je ne suis pas le seul à se questionner. Alors je me dis que ma réflexion pourrait peut-être servir aux autres qui cherchent.

- C’est bien dit comme ça, mais n’empêche, le ton moralisateur on le sent bien dans
vos chroniques.

- Écoutez, je veux être un hôte poli : On vient me visiter, je reçois. Je m’efforce de bien écrire, de détendre l’atmosphère avec un peu d’humour, j’essaie de varier mes plats, je prends soin de ne pas trop dire de bêtises… mais ciboire, je suis chez-nous !

- Oui, mais vous venez nous chercher dans la rue pour qu’on vous visite.

- Bien sûr, bien sûr, bien sûr. Je me suis un peu emporté. N’empêche que c’est vrai : je suis chez-moi. Je veux dire par là que c’est de mon point de vue. Il n’y a rien de vraiment objectif dans ce que j’écris. Il n’y a que la quête de compréhension qui soit « partageable ». Cette quête, elle est bien réelle et se passe presqu’en direct. Beaucoup de réflexions, de façons de voir (et même de vivre) me sont venues en écrivant, en me questionnant, en présentant mes idées. On ne sait pas au départ où ça va aboutir tout ça. On a une petite idée, mais au développement ça prend des proportions parfois inattendues.

- Comme cette petite montée de lait de tantôt ?

- Exactement. Pourtant je faisais bien attention.

- Bon. Mais revenons à cette Morale dont il est question. Faut-il ou non moraliser ?

- Je crois que oui. Parce que voyez-vous, les gens sont toujours très occupés. La plupart n’aiment pas trop penser ou n’ont pas tous les repères nécessaires. Leur vie est trop trépidante ou trop astreignante. Quoiqu’il en soit ils font face quotidiennement à différentes problématiques et dans des humeurs souvent bien changeantes. Il leur est très difficile, sans longuement réfléchir ou prendre des avis judicieux de personnes sages, de régler les petits conflits. Souvent ils vont prendre une position qui va empirer les choses.

- Mais vous, vous êtes au-dessus de la mêlée, c’est ça?

- Mais qu’est-ce que je disais tantôt ? C’est de moi que je parle, connard. Cout’ donc, me lis-tu quand je parle ? Je n’utilise pas le « je » mais c’est pour faire plus littéraire, bon yeu! C’est facile à comprendre, me semble.

- Je sens que vous allez encore vous excuser.

- Bien sûr, bien sûr, je m’excuse. Je m’excuse. Mais c’est ça quand même. C’est un exercice d’analyse; je me sors du lot pour (me) nous observer. Dans cette marche en forêt, je laisse le peloton parfois pour grimper dans un arbre afin d’avoir une vue d’ensemble sur notre groupe et de la directions où l’on va. Mais je suis toujours de ce groupe d’humains; je n’ai pas de perceptions extérieures à nous comme peuvent l’avoir les animaux de la forêt sur notre présence. J’aimerais bien avoir leur idée là-dessus. Là je serais au-dessus de la mêlée. Mais, enfin, poursuivons.

- Nous disions…

- Nous disions que tout le monde, bien souvent, se couche en se disant que tout ne va pas toujours pour le mieux. La vie est compliquée, nous sommes complexes. On est tous un peu à la recherche de la lumière. On voudrait que tout ait un sens, que toutes nos actions soient les bonnes. Sans regret. Sans envie. Sans remords. D’où, si je peux me permettre…

- Bien sûr, allez-y, allez-y.

- Merci. D’où cette favorable fréquentation de moralisateurs tel que je peux parfois être. On s’entend ; pas celui qui moralise après, mais avant que les choses se passent. Il faut annoncer la courbe avant qu’on l’ait passée, pas après. On philosophe avant ou pendant qu’on vit les évènements. Calmement et dans le respect des limites, des réalités de chacun. Sinon ce n’est plus de la compréhension, c’est du prêche. Ça devient du moralisme qui énerve tant.

- Mais qui peut le faire ? Qui a cette autorité ?

- Bien souvent nos amis. Les sages dans notre entourage. Nos parents quand on était petit. Enfin toutes les personnes de gros bon sens. Ils ont cette autorité.

- Oui, mais eux qui les éclairent ?

- Je suis content de cette question. Un peu plus et je me la posais moi-même. C’est là où nous en venons. Ce sont à eux qu’il faut s’adresser; eux, visitent les philosophes, vont lire, s’interroger, chercher, et souvent trouver, au moins temporairement, des réponses, des modèles à suivre.

- On vous dépeint comme un objecteur de conscience. Vous, comment voyez-vous ça ?

- C’est un titre plutôt honorable. On confond souvent avec un empêcheur de tourner en rond, ou quelqu’un qui cherche constamment la contradiction. Là- dedans je ne me reconnaitrais pas, mais dans le sens premier du terme, souvent attribué au militaire qui refuse de combattre dans certaines situations par respect absolu de la vie, là je suis partant.

- Faut-il donc toujours philosopher ?

- Diderot dit : « Le peuple parle de vivre d’abord et de philosopher ensuite; mais le sage propose de philosopher d’abord et de vivre ensuite, si on le peut ». Moi, je pense qu’il faut surtout vivre, quitte à ne jamais philosopher. Je ne crois pas que mon chien est en train de rater sa vie -quoique je le soupçonne de philosopher un peu. Car philosopher permet peut-être justement de profiter pleinement de la vie. Surtout pour une espèce comme la nôtre, encline à de grandes angoisses. Nous sommes constamment tiraillés par l’envie, le remords, l’orgueil, l’exaltation. On est moins soumi à l’instinct, alors il nous faut tout acquérir, apprendre, transformer. On ne peut pas vraiment bien vivre sans réfléchir, communiquer, philosopher un tant soit peu.

- Mais l’introspection intensive n’est pas le fait de tout le monde. Et comment mesure-t-on une plénitude de vie ?

- Je crois qu’on a tous nos moments d’introspection, de grands questionnements sur nos vies ou sur la vie en général, mais c’est souvent dans les moments lourds : les grandes décisions, lors des gros problèmes. Idéalement ce serait bien d’avoir pratiqué avant, lors de situations plus légères. Idéalement ce serait bien d’avoir conservé une certaine maintenance quotidienne et agréable.
Quant à la plénitude de la vie je dirais qu’on a tous un rendez-vous avec soi-même à un moment donné dans la vie (et certainement avant de mourir) et c’est là qu’on aura un regard révélateur sur « l’ensemble de son œuvre ». Vaut mieux être préparé. L’examen risque d’être court, les questions embêtantes, et le verdict tranchant. Le philosophe s’étant évalué en se passant régulièrement quelques contrôles risque moins d’être déculotté.

- Mais n’est-ce pas une mortification un peu ridicule que de se tourmenter sans cesse ? N’est-ce pas ainsi une façon de rater sa vie pour ne pas rater sa mort ?

- Le poète en moi a envie de mourir constamment, le philosophe heureusement le divertit. Se tourmenter n’est pas un exercice si déplaisant. C’est une sorte de travail. Certains prennent plaisir à travailler, vous savez.

- Et d’autres pas. Nous sommes bien placés pour le savoir. Alors la question est toujours la même : À quoi prétendent les moralisateurs de votre espèce ?

- … Oh, je ne m’attendais pas à cette question là.

- !?!?!?

- C’est vrai. Euh… pouvez-vous répéter la question ?

- C’est très bien de faire son affaire en son âme et conscience, mais pourquoi vouloir vendre sa vision aux autres ? Pourquoi ne pas se contenter de penser et laisser penser comme de vivre et laisser vivre ?

- Chacun peut chanter dans sa douche. Pourquoi certains ont-ils le besoin de monter sur les planches ? Peut-être que là on en arrive au domaine de l’art. Philosopher est un art. C’est une expression. C’est du domaine de la communication. Les artistes proposent une façon de voir, de ressentir les choses. Ils modifient la matière pour l’exprimer aux autres. Il y a toujours une proposition là-dedans.

- Oui, mais la portée n’est pas la même. On sent moins les intentions derrière.

- Pas sûr. Ils reflètent leur époque, ils alimentent les courants de pensée. Plusieurs prennent carrément position, et leur portée n’est pas sans conséquence. Doivent- ils ne produire que pour eux?

- Chacun veut influencer l’autre; on ne s’en sort pas. On est toujours étonné que l’autre n’aime pas ce qu’on adore. Ou pire encore, aime ce qu’on méprise. On ne comprend pas. On a le sentiment que l’autre est (au moins un peu) dans l’erreur. Mais comme c’est le lot de tout le monde, n’est-il pas sage de laisser les choses aller?

- Sûrement, mais ce n’est pas communiquer. Je le répète l’artiste, le créateur, ne laisse pas les choses comme ça : il développe, rebâtit, suggère. Son esprit, ses émotions lui commandent d’intervenir. De proposer autre chose. La philosophie est un art… qui tend vers la science peut-être, mais, selon moi, un art d’abord.

- Disons. Mais moraliser, faire les leçons, prêcher…

- Nous sommes des êtres moraux; de ça non plus on n’en sort pas. Toutes nos questions, toutes nos actions, nos œuvres sont morales. On peut fonctionner sans réfléchir, d’ailleurs on le fait assez souvent, mais du moment qu’on réfléchit sur ce qu’on fait on devient moral. Et c’est là qu’on prête l’oreille aux philosophes, aux moralisateurs.

- Oui, d’accord, mais on prête l’oreille à ceux qu’on veut bien entendre.

- Exactement, voilà où nous en sommes. L’étape suivante est de discourir sur LA MANIÈRE ET LE PROPOS.

- Ce que nous ne ferons pas maintenant.

- Oh non. Là, le lecteur est fatigué.




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dimanche 22 mars 2009










Un monde gentil mais bien commercial


Le boxing day - qui en passant devrait être représenté par des boîtes plutôt que des gants de boxe (!?) - n’a plus la subtilité de nous frapper le lendemain de Noël. Non, la vente d’après Noël on nous la passe avant, on ne prend pas de chance. C’est dans le journal du 24, aux Ailes de la mode, au Centre Hi-Fi, c’est parti mon kiki, toute la journée, c’est le méga solde d’après-Noël (sic). Ça, c’est du marketing. Bah, un jour avant, me direz-vous, c’est pas si pire, ouais, mais c’est comme ça qu’on va y arriver : un jour à la fois. Et bientôt on va pouvoir retourner nos cadeaux avant même de les offrir. Extraordinaire, non ?

Noël, c’est une grosse business ; jamais vu tant d’espace occupé par ces réclames en cahier A, le cahier des grosses nouvelles, des éditoriaux, des actualités, du Monde… où tiens, justement, il y a un article de misère intitulé JOURNÉE TROUBLE EN GUINÉE, juste au-dessus de la grosse nouvelle 70 % DE RABAIS super solde chez LaBaie. Ça, c’est du marketing. Plein de cadeaux, c’est Noël.

Si, si, regardez, tout est réduit (même la qualité) : DES AUBAINES / SUPER SOLDE / VENTE D’INVENTAIRE / FAUT LIQUIDER, l’entrepôt est bourré jusqu’au plafond. Vous en voulez un, il est même gratuit… à l’achat de douze.

« Pardon, monsieur le commerçant, ça fait cinq magasins que je fais : est-ce qu’il vous reste des poubelles, des grosses sur roulettes, des corps à vidange? » Non, ça on n’en a plus. Mais on a tout ce qu’il faut pour les remplir.

AUBAINES INCROYABLES / ÉCONOMISEZ / QUANTITÉ LIMITÉE, HÂTEZ-VOUS… Ça, c’est deux propositions sémantiques qui ne vont pas ensemble, économiquement parlant. On ne réduit pas le prix sur la rareté. Normalement on l’augmente. Les chambres d’hôtel ne sont pas à moitié prix l’été.

C’est tellement ÉNORME. Avez-vous déjà acheté (souvent des vêtements, toujours des matelas) avec des réductions de 50% et même 80% sur le prix régulier ? Et, forcément il reste une marge de profit. Avez-vous déjà imaginé la marge indécente de profit sans ça ? Heureusement pour nous, les prix sont toujours réduits. Il est même impossible d’acheter un matelas au prix régulier, à moins d’en avoir un deuxième gratuit, ou un lave-vaisselle, ou je ne sais quoi…

Mais qui veut-on leurrer ? Y-a-t-il tant d’enfants qui achètent des matelas ? Toutes les propositions commerciales sont enfantines. Sont gentilles, avenantes, prévenantes.

Et moi qui chante que le monde est dur… Non, le monde n’est pas dur. Il est gentil. Tellement gentil, toujours attentionné. Plein de sourires et de poignées de main vigoureuses… autour du comptoir. Les hommes, dès qu’ils ont une cravate au cou, ils civilisent : « Bonjour, ça va bien ? » Tu tires dessus un coup : « on veut vous faire économiser », tu tires encore un autre coup : « on est là pour vous, on a pensé à vous », tu tires même pas dessus, et ça marche tout seul : « Félicitations, vous avez gagné… Voulez-vous essayer, c’est gratuit… On est dans le coin, profitez des nos essais sans engagement… C’est gratuit… On vous le donne… On en a plein d’autres comme ça, qui nous ont coûtés une fortune et qu’on veut donner à tout le monde qu’on ne connaît pas ».

Pure gentillesse. Prodigalité. Altruisme. «Notre souci : votre bien-être ».
Rien d’autres ?
Attendez… non, pas vraiment.
Attendez, je lis la réclame : …patati, patata… vous ne payez rien pendant 2 ans … pas d’intérêt, même pas les taxes… on vous donne un cadeau en plus… on vous livre gratis… Non, je ne vois pas : ça me semble tout à fait caritatif. Répandre le bonheur autour de soi. Rendre les autres plus riches. Tiens, c’est bien marqué ici : Au service des gens… votre satisfaction nous tient à cœur. On vous en donne plus pour votre argent





On vit dans un monde merveilleux. Y’a plein de gens comme ça qui font du bénévolat. Tiens, les livreurs de pizza par exemple, souvent des jeunes qui donnent de leur temps. Oui, oui, lisez par vous-même : LIVRAISON GRATUITE. Pure bénévolat. Parfois je fais un don, discrètement. Mais tout le monde n’a pas autant de cœur. Souvent les riches (toujours les riches) abusent de cette humanité. Tellement, que beaucoup de restaurateurs, sensibles à la justice sociale, offrent une réduction de 10% si vous passez ramasser au comptoir. Tous des philanthropes. Pensez, s’engager à faire un don de10% afin de permettre un meilleur accès de ce service (gratuit, ne l’oublions pas) aux plus démunis.

Non, non, le monde n’est pas dur. Ou alors avec un centre mou. On n’est pas loin du cœur, mes amis. Pas loin du cœur. Et nous, pendant ce temps-là, que fait-on ? On chicane sur des riens. L’essence à $ 1.39.

Bah! $ 1.39, on a fini par s’y habituer. Mais là, $ 1.52, WÔ!
La panique, mon vieux, à chaque fois que ça monte de 10¢. Wôô, wôô, là les stations services sévissent : on barre les pompes. Pourquoi ? C’est rendu qu’on se fait voler, m’a répondu avec franchise un franchisé. Tiens, c’est justement ce que je pensais moi aussi. Dur coup pour l’humanité. On devient voleur passé $ 1.50. À $ 1.75, on va bien mettre le feu.

C’est comme ça, chaque fois que ça monte de 10¢ il y a un peu d’humanité qui se perd. La bousculade aux pompes : tout un branle-bas pour sauver quoi ? $ 7 - $ 8, qu’on va se dépêcher d’aller dépenser pour une poutine et un coke avant de souper ? La bousculade pour un plein d’essence qui va nous durer quelques jours. Après, pas le choix, on paiera le prix, calmement, très civilement en s’envoyant des « bonjour, comment ça va ». Ça m’étonne toujours ces réactions de mes semblables. C’est pas pour faire l’important, mais je me bats jamais en bas de $ 100. Question de principe.



Ah! Quel monde incroyablement commerçant : à la télé, dans les journaux, au téléphone, dans la rue… tout ce monde toujours après moi pour me commercer quelque chose. Dès qu’on me sourit je crains le pire. Pas normal, ça. Arrêtez de vous intéresser à moi que pour mon bien. J’n'en ai plus ! Par contre, moi aussi j’ai des causes à promouvoir. Tiens, pour vous encourager je vais l’acheter votre barre de chocolat, en échange, pouvez-vous m’acheter ces crayons que je vends ? Et votre chocolat je le garde pour le prochain qui aura un crayon à me vendre. Moi aussi j’ai un petit voyage à financer, une partie de soccer (ou de golf), une petite tombola, enfin plein de projets. Moi, aussi.


Mais j’ai bien peur que sans nos petits commerces on ne s’envoie plus la main... qu’on ne s’envoie que chier.


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dimanche 15 mars 2009

La dégénérescence


Ça dégénère, mon vieux!
Ça dégénère.

Faut qu’on génère
Mon géronte,
Régénérons !

Tassez-vous les jeunes
Place aux vieux !
Grey power! Grey power!

La dégénérescence, mon vieux!
Ça n’a pas de sens
Lato sensu
Stricto sensu
On perd ses sens mon vieux!
Ça n’a plus de sens
On pilote au radar
Vieillard!
Mais quel radar, mon vieux!
L’avoir eu jeune
Me serais pas perdu
Mon vieux!
L’avoir eu jeune… Ah!

On devine, on comprend, on sent les choses
Vieillir nous rend efficace
On dégénère, d’accord
Mais dans l’efficacité
Mon vieux!
L’efficacité

Tassez-vous les jeunes
Place aux vieux!
Grey power! Grey power!

On n’entend pas tout
On fait répéter
Mais on comprend du premier coup
Pas besoin de répéter
Ça c’est de la performance !
Mon vieux
Ça dégénère
Mais en mieux

Besoin de lunettes, peut-être…
Mais pas pour lire entre lignes
Ma vieille!
Moins d’énergie, c’est vrai…
On fonctionne avec moins d’énergie
Ma vieille!
Ça, c’est de la performance !

Vieillir nous rend efficace
Mon Géron!
On fait plus avec moins
On performe enfin
Patron!

La dégénérescence, mon vieux
Ça n’a pas de sens
Ça dégénère !
Ça dégénère !

La sénescence, mon vieux
Ça n’a pas de sens
Ça décati !
Ça décati !

Mais on s’en fout
On n’a pas à être jeune
On l’a été
Mieux vaut tôt que toujours
Faut être vieux
Maintenant
On ne le sera jamais
Autrement
Mieux vaut tard que jamais

Tassez-vous les jeunes
Place aux vieux!
Grey power! Grey power!

Gérontocrates
À vos cartes!
Hein?
À vos cannes!

Grey power! Grey power!



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dimanche 8 mars 2009

Mourir pour rien dans une guerre perdue


C’est bien ce que j’ai lu et entendu cette semaine. Pour rien ? Je fatigue. Quelle est cette compréhension ? Pourtant ce n’est pas rien la guerre. Comment peut-on mourir pour rien dans une guerre ? Comment peut-on penser qu’on ne peut pas perdre une guerre ? Ça meurt des deux côtés assurément. Et une guerre comme ça, ça ne se gagne à peu près jamais. Ça finit toujours en compromis : un des deux camps recule sur ses prétentions… et c’est l’armistice. Celui qui « gagne » ne sait jamais trop quoi faire avec ça. Surtout quand c’est l’agresseur. Il est pris avec des hargneux, de futurs revanchards, une situation impossible et coûteuse à gérer. À la fin, souvent il se retire avec butin bien maigre.

Alors imaginez quand il ne gagne pas. Pas d’erreurs, leurs soldats meurent toujours pour rien. Ces guerres télécommandées et commandées sous de faux prétextes ne servent généralement à rien. Nous les acceptons parce que nous sommes tous un peu barbares. C’est dans nos gènes. C’est une pulsion. Dans le processus de l’évolution on est encore pas mal plus singeux que sapiens. Les sages en désaccord discutent, les singes se battent.
Dans un désaccord on se rend finalement à l’argument imposant de l’autre. De gré ou de force. De gré, ça sert aux deux. De force ça sert à rien. Ce n’est que partie remise.

J’essaie toujours de comprendre : si on croit gagner la guerre, alors nos soldats ne meurent pas pour rien, ils sont même des héros. Mais du moment qu’on pense la perdre… alors là on ne joue plus. Si le jeu n’est pas paqueté en notre faveur, on débarque. Rembarquez-moi tout ça ! On s’en va. Du coup, ça rend effectivement leur mort bien inutile. Du coup ça donne une bonne indication des motifs au départ de la faire : jamais c’était si important, jamais cette guerre était essentielle, vitale ou juste comme pourtant cette entreprise extrême devrait toujours l’être.

On peut se demander si on a bien fait d’attaquer, mais jamais si on a bien raison de se défendre. En tout cas, il y a un côté où on ne meurt jamais pour rien.

J’aurai été contre tout finalement dans cette guerre : de la faire, de la poursuivre, de l’arrêter. Mais je me réjouis quand même qu’on l’arrête.

Si on se replie, si on décide de parler avec les talibans, si on convient de laisser ces peuples gérer leurs affaires eux-mêmes, si on réalise qu’on n’a pas affaire là (autrement qu’en mission de paix), alors nos soldats ne seront pas morts pour rien. Leur sacrifice aura servi au moins à nous donner cette leçon. On aura perdu la guerre, mais gagné un peu de sagesse et d’humanité.

Mince victoire, mais bon, il en faut bien une pour que nos soldats ne soient pas morts pour rien.




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dimanche 1 mars 2009

La crise économique; réjouissons-nous !


"Où sont rendus nos dimanches?" Voilà le titre d’une chanson qui suggère de prendre le temps de vivre. Au moins un jour par semaine. Un jour seulement, pour s’arrêter un peu, profiter enfin de ce qu’on a tant ramassé. Un jour où on ne travaille pas, on ne produit rien, un jour où on ne consomme pas, on n’achète rien. Une trêve dans cette infernale course à l’AVOIR.

Ça implique bien sûr que l’économie recule de 15 % (un jour sur sept), mais bon, il reste bien six autres jours, c’est amplement suffisant.

Une grippe vous force à garder le lit? Tant mieux! Vous aviez besoin de repos, c'est quoi le problème ? Évidemment c’eût été mieux de rester au lit sans la grippe… mais bon, puisqu’il faut vous forcer.

Quel beau dimanche après-midi !

Mais je suis seul dans le parc. Ma femme magasine – y’a des spéciaux –, mon chum tond le gazon – y’é long–, mon frère travaille aujourd’hui – son employeur a annoncé des spéciaux–, je suis tout seul. Il n’y a que l’itinérant pour me tenir compagnie, les autres sont retenus par leur compagnie…
Un autre jour ? Oubliez-ca. Les autres jours de la semaine on travaille. Samedi, alors ? Oubliez-ca. On court, on est occupé à faire tout ce qu’on n’a pas eu le temps de faire la semaine (comme tondre le gazon… qui, ma foi, fait exprès pour être long cette journée-là). Mais il reste le dimanche ? Oubliez-ca. Le dimanche c’est temps double ; le temps double du samedi.

On vivra quand, bon Yeu ? Quand on s’ra vieux ? Entre le bowling et le bingo sur quelques médications ?

Moi, je veux maintenant. Je veux, le dimanche, retrouver les miens. Peut-on avoir un souper en famille, baptême, sans qu’il en manque toujours un retenu quelque part dans un quart de travail déshumanisé ? À faire quoi, je vous le demande ? À remplir une van pour qu’elle soit prête dès le lundi matin. Pour ne pas perdre de temps !?

Moi, je me réjouis que le monde (hélas bien obligé) me rejoigne ce jour-là. Oui, on y laissera 15 % de rendement, peut-être, mais on vivra un peu, bondance! On vivra un peu de notre abondance.

Transformons cette crise en prise de conscience.

Alléluia ! Enfin un peu d’humanité à l’horizon.
Et pour 15 % , c’est pas cher.


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