Le Frankenstein en nous
La cryogénisation : pas sûr
que ce soit une bonne idée. Il ne faut pas confondre la mort avec le coma. Le
coma n’est qu’une perte de conscience, le souffle y est toujours, et ainsi de même l’histoire
et la personnalité du sujet. Mais lorsque la vie a quitté la chair, la
conserver ne préservera que les tissus, l’âme, elle aura disparu. Si on ranime
un jour le corps, c’est une nouvelle vie qui l’animera. Une nouvelle entité,
donc.
L’enveloppe corporelle n’est
rien des gens qu’on aime, c’est l’attention, l’intérêt qu’on nous porte qui
nous font aimer cette personne. La personne atteinte d’Alzheimer, au dernier
stade, c’est une étrangère. Le physique nous la rappelle, mais elle n’est plus
là.
C’est ce que je crains dans ce
procédé : une momification technologique, une greffe, en fait, d’un corps
entier sur une âme inconnue. On devrait plutôt chercher à pixéliser, encoder
informatiquement la psyché d’une personne, et sous l’avatar on retrouverait davantage, je crois, l’être aimé. Car
c’est bien le caractère unique d’une personne qui fait cette personne. Le corps
n’est que le terminal de toutes les ondes et la lumière de l’esprit.
En passant, cette recherche
est bien contraire à toute spiritualité qui veut que l’âme soit distincte du
corps. Pour des croyants, cette admission est troublante...
Laissons les morts reposer en
paix, ils ont eu leur tour. Maintenant disparus, ils brillent par leur absence
et sont souvent magnifiés, comme jamais ils ne l’ont été de leur vivant. En revenant,
ils auraient un bien mauvais rôle : celui de zombie.
Laissons-les vivre leur mort.
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