dimanche 29 novembre 2009

Et la malbouffe intellectuelle ?






On n’avale plus n’importe quoi. On vérifie les étiquettes : pas de gras trans, pas trop de sel, de sucre, colorant artificiel… De plus on recherche les meilleurs apports caloriques, nutritifs, bref on surveille de près l’alimentation de nos enfants pour favoriser une meilleure croissance et on cherche à manger santé pour notre bien-être physique. Bien. Très bien tout ça.

Il serait peut-être bon maintenant de faire la même chose pour le bien être de notre esprit et surtout celui, en développement, de nos enfants. La malbouffe intellectuelle sévit actuellement. Ce ne sont, bien souvent, que des calories vides dans les divertissements, l’information, l’enseignement. On se bourre de sucre, de sel, et de gras parce que c’est facile et ça goûte bon. Mais il nous faut aussi de la viande, des protéines, du fer, des vitamines.

C’est bien l’humour partout : à la radio, le matin, au bureau via les clips internet, le soir à la télé ou au spectacle d’un des innombrables humoristes, mais ça fait beaucoup de sucre dans une journée. À peu près que du sucre. Pas beaucoup de viande là-dedans.

Dans les informations - surtout les chaînes qui en présentent en continue -, alors là, c’est du sel. Beaucoup, beaucoup trop de sel. On aime ça, c’est plus goûteux, on en rajoute toujours un peu, ça nous fait faire des hon ! des woo ! , des « ça s’peux-tu ! » Ça excite, ça donne soif, mais ça ne nourrit pas. Tout juste hors-d’œuvre bons à couper l’appétit.

On en recherche toujours et on s’en fait offrir partout : les téléréalités, les émissions trash, les ramassis de vidéo spectaculaires d’accidents, de catastrophes, d’incidents disgracieux. Ça fait beaucoup de sel tout ça dans une journée. Pas bon pour le cœur; ça durcit les artères.

Et mêlé à tout ça, mêlant tout ça, le gras trans épais et omniprésent qu’est la publicité développée et présentée sous la forme du plus petit dénominateur commun. Publicité envahissante, débordante et dégoulinante par-dessus tout ce sel et tout ce sucre. Du bon gros gras trans épais. Rien de bon pour la santé de l’esprit, en plus de procurer de sérieuses crampes à l’humeur quotidienne.



Oui, je sais, on peut bien se retirer à la campagne, sans journaux, sans télé ou internet, mais, comme dans les régimes, un jeûne sévère n’est jamais recommandé. Quand on en revient on en consomme encore plus en réaction à la carence. On n’y échappera pas sans modifier nos habitudes et notre mode de consommation.

Tous les jours, les philosophes diététiciens vous le diront, il nous faut notre part des principaux éléments: un peu de réflexion, de solitude, d’apprentissage, de lecture, de recherche. Il faut se mettre au contact d’un art et d’une culture substantielle. Sans quoi on perd nos dents d’analyse critique. Nos muscles de réflexion s’atrophient, notre système d’imagination s’affaiblit. On ne digère plus bien les carences, les frustrations et on finit par développer une cirrhose du cerveau. Bon.

Comprenons-nous bien : absolument rien contre les sucreries, les chips et autres cochonneries - c’est un junkie qui vous parle -, seulement, faut pas que ç’en devienne tout notre régime alimentaire. Bon. Ce que je dis c’est que je souhaite aussi, un jour, un étiquetage sur tous ces produits de consommation nous avisant avant chaque émission, chaque article de journal, chaque spectacle, des valeurs nutritives contenues : Stupide…. 27 %, Insipide…. 67%, Névrose… 15%, Contamine…22%, Protéine intellectuelle… 4 % Calories… 1%. Peut contenir des traces d’intelligence.


Je souhaite un étiquetage, mais surtout une pareille attention de notre part sur tout ça comme sur notre consommation alimentaire. L’esprit, comme le corps, doit être quotidiennement nourri des parts essentielles et équilibrées d’éléments nutritifs. Sinon, ça nous fait une société obèse d’insignifiances et de superficialités.


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dimanche 22 novembre 2009

PENSÉES en vrac



On se sait ignorant qu’en apprenant.

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Ceux qui disent qu’il n’existe pas de Vérité Absolue,
en disent donc Une.

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Pendant qu’on parle, on n’apprend rien.
J’imagine que les savants savent se taire plus que d’autres.

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Pour apprendre il faut comprendre, non pas accumuler de l’information. Il y a des éclairages qui aveuglent. Directement dans les yeux on voit on ne distingue plus rien.

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L’univers n’est pas plus mathématique qu’il est coloré.
Sauf pour nous.

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Dans le règne animal, je crois que nous sommes loin derrière.
Si nous sommes vraiment à l’image de Dieu, prions qu’il n’existe pas.

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La perfection n’est pas de ce monde.
Mais, qui a bien pu dire ça ?

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On s’illusionne beaucoup,
mais nous sommes toujours soumis à nos viscères.
Même nos plus grands cerveaux, nos plus beaux esprits,
on les retrouve quotidiennement assis, chemise retroussée à pétarader dans le bol de toilette. Ils ont beau avoir des idées transcendantes, ça sent mauvais pareil.

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Il est possible dans un procès d’y voir un homme d’honneur, mais jamais deux s’affronter.

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Tout le monde est pour la paix, après avoir gagné.

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C’est important la paix.
Il nous la faut pour préparer la revanche.

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Attention avec le mépris, beaucoup se méprennent.

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On apprécie le chien pour ses qualités et le chat pour ses défauts.

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Un défaut c’est une qualité qu’on a exagérée beaucoup.

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On fait toujours ce que l’on veut,
mais on ne veut pas toujours ce qu’on aimerait.

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Pour être libre on n’a pas le choix, faut faire des concessions.

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Arrêtons de vouloir tout prévenir :
laissons un peu de chance au hasard.

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L’éventualité de la mort est sans doute le plus grand stimulant à la vie, à la paix, au bonheur. Vive la mort.

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Il y a une autre chose aussi grave que d’enlever la vie :
la donner.

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La mort ce n’est rien de très éprouvant
à part les invivables cinq minutes avant.

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dimanche 15 novembre 2009

Lettre à un changeur de monde



Laisse un peu l’humanité se reposer; changer le monde c’est épuisant. Laisse l’idiot, idiot, le malin, malin, la victime, victime, le soleil se lever, se coucher, laisse un peu la terre tourner.

L’oiseau que tu as nourri ce matin, le chat l’a mangé ce soir. Celui-là même que tu as recueilli et qui se fera écraser dans la rue demain. Ce n’est toujours qu’un peu d’eau que tu retiens dans tes mains; le ruisseau n’en perd rien. La jolie fleur que tu as coupée, tu la regardes mourir dans le pot. Elle meurt que tu l’aies aimée. À ta fiancée, n’offre pas de fleurs, amène-la plutôt au jardin.

Le monde n’est pas à changer; il se change lui-même. Le tyran est remplacé par l’empereur, l’empereur par la junte, la junte par la clique, la clique par les autres qui les dominent, et tous ceux-là te commandent.

Il y a mieux, il y a pire. Il y a vivre et laisser vivre, faire et laisser faire. Mais tout ça ne t’est jamais possible quand tu dois changer le monde. Faudra faire la guerre pour avoir la paix, tuer pour sauver des vies, bouleverser l’ordre établi pour en établir un autre que d’autres générations voudront renverser. Le monde, finalement, reste bien constant; se fait, se défait, se refait; il évolue à peine, aux mille ans.

Changer le monde, c’est mêlant. Il y a ceux qui le veulent comme-ci, les autres qui le veulent comme-ça, et l’immense majorité qui ne savent pas ce qu’ils veulent. Il y a toujours des bons côtés et des mauvais, des avantages et des inconvénients. Il y a toutes ces Révolutions qui passent en fulgurance, mais l’Évolution en escargot n’avance qu’à son rythme, qu’un peu aux mille ans. Elle prend son temps.

On veut le faire évoluer plus vite. Mais comment, et par où aller ?
Pourquoi, sur cette planète, l’homme devrait-il évoluer plus rapidement ? L’âne et le cheval d’aujourd’hui, ne sont pas d’une autre époque, ils sont biens contemporains. Ils se contentent d’évoluer un peu à chaque mille ans.

L’humanité n’est jamais aussi bien que quand elle vit sans guerre, sans crise économique, sans épidémie ou catastrophe naturelle. Ce que l’évolution n’apporte pas, bien au contraire. L’Homme, hélas, me semble toujours le même singe qu’il y a dix mille ans aux prises avec sa conscience, ses besoins, ses carences, sa cupidité, sa vanité, ses éclairs de génie, et ses longues nuits d’ignorance. Les sociétés humaines restent à peu près toujours les mêmes, avec ses classes de riches, de pauvres, de puissants, d’exploités. La démocratie est une lente évolution qui ne permet jusqu’à maintenant qu’à choisir ses exploiteurs.

À notre époque savante et technologique avancée, nous battons les records de la faim dans le monde : un milliard de nos semblables ne trouvent pas de quoi manger. Chez les animaux on s’inquièterait d’une espèce en voie de disparition. Pendant qu’on visite la lune et mars, une bonne partie de l’humanité, vit encore au Moyen-âge. Je ne crois pas que nous soyons moins barbares, peut-être un peu moins exposés à l’être, c’est tout. Dans les prisons on torture toujours, mais au confort de l’air climatisé. Voilà, seulement, où nous avons évolué : plus au confort.

Le monde (occidental) est plus au confort qu’avant mais est-il plus heureux que ses ancêtres d’il y a deux mille ans qui mangeaient, buvaient, baisaient tous les jours? Mais on mourrait plus jeune. Et puis ? Maintenant on passe vingt ans de plus… à soigner qui son cancer, qui sa démence, qui sa détresse : on dégénère plus longtemps, c’est tout. Voilà, seulement, où nous avons évolué.

Évoluons, même si ce n’est pas toujours par en avant, évoluons, mais lentement. Apprécions l’animal en nous.

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P.S. : Et si jamais, il te faut absolument voir un monde différent, essaie de te changer un peu toi-même. C’est incroyable comme le monde n’est pas pareil quand on tombe en amour. Ou quand on s’adonne à la poésie.


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dimanche 1 novembre 2009

Pas vraiment un plomb, mais presque. Réaction à un nouveau projet de loi, publiée dans La Presse du jeudi 22 octobre 2009.

Laissez-nous, je vous prie, notre .08



Après avoir convenu scientifiquement qu’en deçà de .08 d’alcoolémie, c’est correct de conduire (nous avons encore suffisamment nos facultés), comment peut-on décider d’embêter quand même le citoyen à partir de 0.05 (pour le moment) ?

Sortez-moi un seul cas où un accident a été causé par l’effet de l’alcool à un taux aussi bas. Regardez-moi dans les yeux, et jurez-moi qu’en abaissant ce taux à .05, il y aura moins d’accidents causés par une alcoolémie de .08. Ou encore dites-moi qu’il y aura moins d’irréductibles soûlons sur la route. Mais surtout, ne me parlez pas d’effet de dissuasion. Chacun sait que la « dissuasion » n’empêche pas le criminel, le récidiviste, l’irresponsable. Par contre, ça emmerde tous les autres qui n’en ont pas besoin. C’est un raisonnement complètement farfelu. C’est comme si, pour mettre fin à la vitesse excessive, on réduisait la limite de vitesse sur l’autoroute à 70 km/h ! Vous pensez que ça aurait un effet dissuasif sur les courses de chars ? « Viens, man, on se fait une course, mais pas le droit de dépasser 70… »

Voici, ce que je crois :

- Même s’il y a des lois, même s’il y a des règles, il n’y a pas moins d’irresponsables.
- Plus il y a des lois, plus il y a des règles, moins on est responsable. (Plus on contrôle un enfant dans ses agissements, moins on le laisse développer son jugement.)

Un mauvais conducteur (ils sont nombreux), distrait, malhabile, fatigué, stressé, enragé, imprévoyant, est plus dangereux à .00 qu’un conducteur moyen à .08. Voilà, ce que je crois.

Conduire soûl, c’est un comportement criminel. Pas de doute là-dessus. Interdiction stricte. Baliser à un taux de .08, très nettement en dessous de l’ivresse, semble faire un certain consensus. Bon, disons. Mais sanctionner sous ce taux, c’est nettement abusif, tartuffe, irréaliste. C’est une coercition excessive qui ne cause du tort qu’aux honnêtes citoyens. Et c’est peut-être vous, lobbyistes de malheur, qui serez les premiers en infraction.

Misère! Que le monde s’en vient plate et autrement dangereux.

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P.S. : Et puis oui, nous serions la seule province à laisser ça à .08. Nous qui cherchons tant à faire valoir notre unicité, acceptons d’être unique pour une fois.